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Rubrique : Pratique typographique - par cls

Une casse de Block

Nous sommes dans les années 1980. À Paris. Dans le Marais. Rue des Francs-Bourgeois. Une cour intérieure bien cachée par un portail qui la sépare de la rue. Au fond de la cour, une verrière et sous la verrière, une énorme presse typographique. Derrière la verrière, une imprimerie fermée depuis des années. Une imprimerie polyglotte. Des amis m’avaient donné les coordonnées de la propriétaire. Médecin, fille du patron de l’imprimerie, elle avait gardé le lieu intact par piété filiale... jusqu’à l’ordre d’expulsion irrémédiable. Une femme adorable, triste d’être obligée de se séparer de cet encombrant trésor qu’elle avait essayé de préserver jusque là. J’étais venu, moi, pour acheter ce que je pouvais, ce qui restait après le passage des copains. Avant l’anéantissement de ce petit lieu de mémoire. Je repartis avec quelques casses et une agrafeuse à cheval 1930. Parmi ces casses, deux de Block. Une de Block gras corps 48 et une de Block étroit corps 28 et 72, seulement les capitales.

2017. Réappropriation de l’atelier parisien de Fornax après six ans de travaux suivis deux ans d’inactivité forcée. Une gentille stagiaire, Marianne, est venue le temps d’une semaine égayer l’atelier. Que faire, et lui faire faire ? On va réhabiliter une casse qui en avait bien besoin. La casse de Block corps 48. Outre la poussière historique des années 1930, pieusement gardée comme une relique, on y trouvait de la moisissure noire due à l’humidité de l’atelier avant travaux saupoudrée d’une épaisse couche de poussière de béton due à un ponçage sauvage du sol pendant les travaux.

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État de la casse avant intervention. Elle est posée sur le rang. Cassetin par cassetin, les caractères sont extraits et placés sur un composteur en bois. Petit à petit, les doigts se noircissent.

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Le composteur en bois porteur d’une rangée de caractères à nettoyer.

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Marianne à l’œuvre. Armée d’une brosse à ongles, elle frotte un par un les caractères plongés dans un vieux bac à légumes de frigo rempli d’eau savonneuse. Les caractères en attente de bain sont sur le composteur, les caractères brossés se rincent l’œil dans le petit bac blanc  posé dans l’évier.

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Détail du brossage. Il faut, bien entendu, insister sur l’œil de la lettre.

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Les caractères propres font du sous l’eau dans le bac de rinçage.

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Vue générale du plan de travail provisoire de mademoiselle Marianne.

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Après le bain, le brossage, le rinçage, les caractères se prélassent sur leur serviette de bain afin de se sécher près du radiateur.

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Séchés et rutilants, ils sont rangés dans une casse provisoire. On aperçoit, dans le fond la casse d’origine qui n’a pas encore été vidée en totalité.

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La casse d’origine vidée. Ne reste plus que la poussière 1930, les moisissures et la poussière de béton. Tant pis pour la précieuse poussière 1930, il va falloir tout décrasser.

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Détail de quelques cassetins pour voir de plus près l’étendue des dégâts.

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La casse es placée dans le bac de lavage afin de subir une douche à l’eau chaude.

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La douche. L’eau sortit noire pendant un temps certain...

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Détail de la douche. Celle-ci terminée, la casse fut mise à sécher toute une nuit posée contre un radiateur. Au matin suivant, il restait encore de la moisissure bien accrochée. Un second lavage fut effectué, à l’eau assez fortement acidulée à l’acide chlorhydrique. L’intérieur de chaque cassetin fut badigeonné au pinceau et les parois de la casse brossés à la brosse à formes. Séchage une nouvelle nuit, et remplissage avec le caractère propre.

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La casse et son caractère dans un état de propreté acceptable. Coût de l’opération en temps : deux jours pour le nettoyage des caractères, deux jours pour celui de la casse. Cette série d’opérations est à répéter pour la quasi totalité des casses de l’atelier. Elles ont toutes subi peu ou prou l’invasion de la poussière de béton. Ainsi reste-t-il à nettoyer 187 casses de grand format (65 cm de large) et 13 casses de petit format (50 cm de large).


Date de création : 12/02/2017 @ 11:41
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