Cette ferraille bizarre et toute rouillée qui ressemble à une baignoire mais qui n’en est pas une, du moins pour les bipèdes, est une pile hollandaise. « Mais qu’est-ce donc, mon bon ami, qu’une pile hollandaise ? Il ne me semble pas que du courant électrique circule dans cet immondice... » va-t-on me demander avec un ton précieux et le petit doigt de la main droite levé, vu qu’il est dix-sept heures et que les autres doigts sont occupés à tenir la tasse de porcelaine de Saxe, emplie de darjeeling fumant.
Effectivement, il n’a jamais circulé le moindre courant électrique dans cette pile. Elle sert à affiner la pâte à papier pour fabriquer (devinez quoi ?) du papier selon la technique traditionnelle avant qu’on ne l’industrialise. Elle a remplacé la pile à maillets (combinaison de marteaux-pilons en bois, d’où le nom de pile qui vient de piler) dans les moulins à papier. Elle travaille plus vite que la pile à maillets.
Celle-là ne sert plus — ou plutôt si : elle sert de décor, hélas ! — en extérieur, devant le musée du papier, à Angoulême. Et c’est bien triste de la voir s’abîmer ainsi, en butte à toutes les intempéries. Rappelons pour ceux qui l’auraient oublié qu’Angoulême, avant d’être la capitale française de la bande dessinée, a été un haut lieu de la fabrication du papier, plutôt de luxe (papier à dessin, papier pour de belles éditions de livres), et du papier fin (papier à cigarettes).
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