Sentence to think about :  Suis-je censé être sensé ?  Soulignac
Last posts

Bibliotératology

Chez les relieurs [3]

Printings

Ben-day

—♦—

The CLS’s workshop
(videos)

CLS-bois

General catalog
Typo and around
Calendar
rss This article is available in the standard RSS format for publication on your website :
http://fornax.fr/data/en-articles.xml

Le Ben-day
(dis, monsieur CLS, raconte-nous comment c’était
l’imprimerie des vieux d’avant le numérique)

Un petit livre de 16 pages va nous donner l’occasion de parler un peu technique, histoire de jeter à la face du monde que le bonhomme CLS qui se complait à déblatérer sur la typo des rues n’a pas oublié les rudiments techniques de la fabrication des livres. Un vrai conte de fées. Tiens, quel hasard, c’est justement un conte qui va nous servir d’exemple : Cendrillon. Une Cendrillon parue entre les années 1930 et les années 1950, on n’a pas pu dater plus précisément. Elle est publiée par les éditions René Touret spécialisées dans les ouvrages pour la jeunesse : contes illustrés, livres de coloriage, abécédaires, etc. Nous n’avons trouvé aucun renseignement au sujet de l’illustrateur Dax qui signe les illustrations de la brochure.

La brochure peut être consultée, feuilletée et lue dans son intégralité en cliquant sur l’image de couverture.

Passons à la techniques, maintenant. Tout d’abord quelques caractéristiques peu communes :

— Les pages de la brochure sont toutes numérotées, de la première à la dernière page.
— Elle est constituée d’un cahier unique de 16 pages, la première page du cahier faisant office de couverture et de page de titre.
— Elle n’est pas vendue directement aux lecteurs potentiels mais à des revendeurs qui l’achètent en lot et qui apposent leurs coordonnées dans le rectangle vierge encadré de rouge de la page 16. Cette brochure est imprimée en offset et les coordonnées du revendeur (ici, la maison H. Neuville) sont repiquées en typographie ; les traces du foulage des caractères sont visibles sur la page 15.
— La composition du texte (d’après Perrault) est réalisée en Nicolas Cochin de la fonderie Peignot. Ce caractère, créé en 1912, est facilement reconnaissable grâce à sa petite hauteur d’x, et aux hampes démesurées des minuscules montantes. Ce caractère est rarement utilisé dans des ouvrages populaires comme celui-ci.

La suite des informations techniques va être présentée sous la forme questions-réponses, pour plus de clarté (du moins on l’espère vivement).

Q. : Pourquoi 16 pages ?
R. : Les pages des livres, qu’ils soient petits ou gros, ne sont pas imprimées une par une. Pour l’impression, elles sont groupées à un certain nombre, et suivant un certain ordre sur une grande feuille de papier — la feuille d’impression — qui, une fois imprimée sera pliée pour former un cahier. Le nombre de fois qu’on va plier la feuille de papier dépend du nombre de pages imprimées par feuille d’impression. Ici, on a 16 pages à répartir sur la feuille d’impression qui a deux faces (le recto et le verso). On va donc placer 8 pages au recto et 8 pages au verso. Mais pas n’importe comment. On les place de façon à ce qu’après pliage, ici pour 16 pages : 3 plis perpendiculaires entre eux, les pages se retrouvent dans le bon ordre pour la lecture. C’est ce qu’on appelle l’imposition.
Lorsqu’on imprime une feuille des deux côtés, sans la plier par la suite, on n’a que deux pages. Lorsqu’on la plie une fois, on obtient 4 pages (deux de chaque côté de la feuille). À partir de ce moment, si on pratique un deuxième pli perpendiculaire au premier, on obtient 8 pages, et 16 pages avec un troisième pli. À chaque pli supplémentaire, on multiplie le nombre de pages par 2. Sauf qu’à partir du 3e pli on va avoir trop de difficulté pour plier la feuille, alors on se débrouille autrement. Mais restons-en à 16 pages.

Q. : Comment disposer les pages sur une feuille d’impression de 16 pages ?
R. : On en place donc 8 de chaque côté de la feuille d’impression, suivant les schémas suivants :

ImpositionIn8r.jpg

ImpositionIn8v.jpg

Une fois imprimé et plié, ça donne quelque chose comme ça, mais avec de l’encre dessus :

Cahier16p.jpg

Q. : Pourquoi les pages de texte alternent avec les pages d’illustration deux par deux ?
R. : Ah ! bonne question. Ici, c’est par souci d’économie. Pour obtenir une brochure en couleur mais à moindre coût, on n’imprime la couleur que sur l’un des deux côtés de la feuille. C’est pourquoi j’ai mis un fond rose au schéma qui a la page 1, ce sera le côté imprimé en couleur. On peut vérifier, si l’on ne me croit pas, que toutes les pages en couleur sont de ce côté-là (que l’on appelle le côté de « première » parce qu’il contient la première page du cahier ; l’autre côté s’appelle le côté de « seconde »).

Q. : Pourquoi y a-t-il une seule image sur les pages 8 et 9, alors qu’ailleurs, il y en a deux ?
R. : Parce que seules les pages 8 et 9 sont l’une à côté de l’autre, au centre du cahier. Elles constituent ce qu’on appelle une « vraie double », sous entendu « vraie double page », les autres pages qui se font face ne sont que des « fausses double ». Il est aisé d’avoir une image unique qui court sur une « vraie double », c’est autrement difficile de faire la même chose sur une « fausse double ». Il faut couper l’image en deux et placer chaque partie sur les pages qui correspondent et régler l’impression pour que les deux morceaux se continuent l’un l’autre pour donner l’impression d’une image unique.

Q. : Comment on imprime les pages en couleur ?
R. : Ici, les images sont imprimées à l’aide de 4 couleurs : un bleu, un rouge, un jaune et un noir. Mais avant d’imprimer, il faut fabriquer les éléments imprimants. Dans notre cas de figure, il faut, puisque la brochure est imprimée en offset, fabriquer 4 plaques imprimantes, une pour chaque couleur et superposer les couleurs imprimées les une après les autres pour qu’apparaissent les images en couleur telles qu’elles ont été prévues.
La préparation des plaques fait appel à une technique qu’on appelle la photogravure. On dit « la » photogravure, mais il y a plusieurs techniques de photogravure. C’est ce qu’on appelle maintenant, en utilisant un terme générique anglo-saxon que l’on a francisé, le prépresse. Ici, la technique de photogravure utilisée s’appelle le Ben-day (pas très français non plus, ce nom-là). C’est une technique presque manuelle qui a été abandonnée assez rapidement pour des techniques plus rapides et qui donnent un meilleur résultat. Enfin... un résultat différent.
Au départ, on a un dessin en noir, rien qu’en noir. On le photographie et on en fait un film positif, au format que l’on souhaite imprimer. Ce sera le film pour fabriquer la plaque du noir. Sur ce film, on place un support transparent, et on colle dessus des trames, qui peuvent être totalement opaques, ou avec des petits points, ou avec des motifs régulièrement espacés, que l’on découpe soigneusement pour correspondre à l’une des trois autres couleurs, le jaune, par exemple. Une trame en aplat donnera la valeur la plus intense de la couleur, une trame avec des petits points donnera, optiquement (notre œil est imparfait), l’illusion d’une couleur plus claire. On construit donc, à la main, découpage après découpage, la composante colorée de l’image en son entier. On produit ainsi 3 films avec trames : un pour le jaune, un pour le rouge, un pour le bleu. On notera que pour le bleu et pour le rouge, je n’ai pas dit cyan et magenta. On n’imprime pas ici nécessairement avec des encres primaires. On peut aussi, si on le souhaite, ajouter sur le film du noir des trames à points pour lui donner des nuances. Nanti des 4 films ainsi préparés, on fabrique les 4 plaques offset dont on a besoin pour l’impression.
En agrandissant un détail de l’image, on peut se rendre compte du résultat obtenu avec le ben-day.

Cendrillon-01detail.jpg

J’en entends déjà qui disent « Oh ! on dirait du Roy Lichtenstein ! » Roy Lichtenstein, dans ses peintures, n’a fait que reprendre le rendu visuel des photogravures tramées. En voyant un tableau de Lichtenstein, j’ai envie de dire, moi : « Tiens ! on dirait du ben-day ! »

Petit détail amusant, pour terminer : Sur l’image de la page 13, le photograveur qui a préparé le ben-day du rouge a oublié de mettre de la trame sur la jambe gauche de Cendrillon. Elle a la jambe toute pâle, la pauvre...

Cendrillon-131detail.jpg


Creation date : 22/06/2025 @ 23:23
Category : - Printings
Page read 262 times


Reactions to this article

Nobody gave a comment yet.
Be the first to do so!


The last one...

Thomas Braun
La Bénédiction
des fromages

frnx-287-mini.jpg

8 pages,
format 11,2 x 9 cm.
tirage à 131 exemplaires en typographie.
30 €

 __________

CLS
A pas feutrés

frnx-281-mini.jpg

Un volumen,
79 cm de long, 17,5 cm de haut.
tirage à 10 exemplaires en linogravure.
250 €

 __________

Marie-Rose de France
Dits

frnx-283-mini.jpg

26 petits textes en proses poétique. Vignettes de CLS.
tirage à 120 exemplaires en typographie au plomb.
60 €

 __________

Pierre Pinelli
Molitor

frnx-280-mini.jpg

24 pages,
format 15 x 20 cm.
tirage à 100 exemplaires en typographie au plomb.
60 €

The gloss book

Marie-Rose de France
Dits

frnx-283-mini.jpg

36 p., format 10 x 14 cm.
composé et imprimé en
typographie au plomb
Tirage à 120 exemplaires.
60 €

(cliquer sur l'image
pour en savoir plus)

The gloss books
Free


Some pages of this site:

Greetings cards

Food poetry

Singular pairs

Swallows of Bannes

Laucou at the radio


... for those who are too lazy to seek.

Visits

 11057679 visitors

 139 visitors online

Fornax éditeur – 18, route de Coizard, F51230 Bannes –– France