En passant :  N'étant pas un homme de pouvoir, je ne puis qu'être un homme de parole.  Soulignac
Les petits derniers...

Thomas Braun
La Bénédiction
des fromages

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8 pages,
format 11,2 x 9 cm.
tirage à 131 exemplaires en typographie.
30 €

 __________

CLS
A pas feutrés

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Un volumen,
79 cm de long, 17,5 cm de haut.
tirage à 10 exemplaires en linogravure.
250 €

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Marie-Rose de France
Dits

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26 petits textes en proses poétique. Vignettes de CLS.
tirage à 120 exemplaires en typographie au plomb.
60 €

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Pierre Pinelli
Molitor

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24 pages,
format 15 x 20 cm.
tirage à 100 exemplaires en typographie au plomb.
60 €

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Marie-Rose de France
Dits

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36 p., format 10 x 14 cm.
composé et imprimé en
typographie au plomb
Tirage à 120 exemplaires.
60 €

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Typo des rues

Générations  -  par cls

Anecdote vaguement typographique...
... et authentique

L'auteur de ce billet fait partie, hélas pour lui, de la génération des baby-boomers (en français exotique dans le texte). Il précède donc d'une bonne longueur, dans l'ordre d'arrivée, les individus des générations X (1965-1980), Y (1981-1995), Z (1996-2010) et Alpha (2011-2025)... et il n’en tire aucune gloire, seulement des rhumatismes articulaires. Toutefois, il se félicite — en tant que typographe — que les lettres de l’alphabet, servent aussi à autre chose qu’à fabriquer du texte. La diversification, c’est la clef de la réussite, même pour les alphabets. Toutefois, il ne comprend pas pourquoi on a commencé par X. En commençant par A, on serait resté plus longtemps dans l’alphabet latin, avant de passer à l’alphabet grec. De plus, à partir de 2026, la génération Bêta se verra affublée d’un nom permettant de faciles calembours ou des plaisanteries fines (Ha, ha !) liées à l’intelligence et à la faculté de compréhension. « Il n’a rien compris, c’est normal, il fait partie de la génération Bêta » ; « Elle n’a pas réussi son test de capacité, c’est logique, elle fait partie de la génération Bêta ». Je les plains sincèrement.

On peut penser que ce type de dénomination utilisant des lettres a commencé vers le milieu des années 1960. Il n'en est rien. On connaît au moins une génération antérieure qui a été ainsi nommée, celle des jeunes entre 12 et 21 ans qui ont vécu en France pendant la Seconde Guerre mondiale : les J3. On sait que pendant cette sombre période, le ravitaillement était rationné et que tout un chacun devait produire sa carte de rationnement pour tout achat alimentaire. Les J3, de par leur tranche d’âge, bénéficiaient de cartes moins restrictives afin de ne pas trop nuire à leur croissance. Les parents des baby-boomers furent, le plus souvent, des J3. Ce fut le cas des miens (allez, franchissons le pas, et parlons de nous à la première personne du singulier, ça fera moins ampoulé). Du moins, ce fut le cas de mes trois mères (plus exactement, de ma mère et de ses deux sœurs aînées, restées célibataires, qui n’avaient qu’un seul neveu). Mon père, lui, à l'époque, passait six ans de vacances forcées en Prusse orientale, en tant que KG. L’armée française, toujours bien organisée, l’avait envoyé sur le front avec un fusil et des cartouches... mais les cartouches ne rentraient pas dans le fusil...

[Saut dans le futur pour cette période ; saut dans le passé pour nous.]

Nous sommes au début des années 1990, peut-être à la fin des années 1980, ma mémoire me joue un petit tour. J’habite encore le 18e arrondissement de Paris. Mais, attention, nuance, pas le 18e chicos, la butte Montmartre et ses pentes, mais le 18e crado ou peu s’en faut, la Chapelle, le bout qui — si Paris était vu comme un camembert — représente la portion de fromage comprise entre les rails de la gare du Nord et ceux de la gare de l’Est. Métro Marx Dormoy. Rue de l'Évangile (oui mon fils, oui camarade, oui compagnon [rayer les mentions inutiles]), au 21, comme l’assassin.

Dans le quartier, cette part de camembert un peu oubliée du reste de Paris à l'époque, s’ouvre un lieu pour tout le moins curieux, étrange, particulier, étonnant, détonnant... pour tout dire : hors du commun. Un restaurant. Quoi de plus banal qu’un restaurant qui s’ouvre, va-t-on me rétorquer avec une ironie agrémentée d'une pointe de perfidie d’un jaune verdâtre. La perfidie est toujours jaune verdâtre, comme le fiel, tout le monde sait ça. Ce à quoi je rétorque à la rétorquerie : « Oui, mais pas n’importe quel restaurant ! ». Rue Philippe-de-Girard. Son nom : Le Couvre-Feu. Nom quelque peu déroutant. On est plutôt habitué à des enseignes comme Chez l'ami Jo T. ou bien La Table à Tür (restaurant musical) ou encore L’Escalope interlope. À chaque fois que je passe devant, quelle que soit l’heure, le rideau de fer est fermé et des volets obturent porte et fenêtres. Curieux. Je finis par acheter un Officiel des spectacles au kiosque du coin, à Marx Dormoy. Le restaurant y est répertorié. Dîner-spectacle. Intrigué, je téléphone au numéro indiqué pour me renseigner. Ce que j’apprends m’étonne, me fait envie, me donne une idée.

Un coup de téléphone à mes parents, un autre à mes tantes.
— Je vous invite au restaurant dans mon quartier. Je ne vous en dis pas plus, c’est une surprise.
D’ordinaire, c’est moi qui suis l’invité au restaurant, en tant que progéniture, en tant que plus jeune, en tant que neveu, mais là...

Le jour dit, à l’heure dite moins une, tout mon petit monde de la génération précédente se retrouve dans mon presque minuscule appartement sous les toits, baptisé par mes soins le Bateau ivre, qui avait été au sixième sans ascenseur mais qui ne l'était plus (toujours au sixième mais avec ascenseur). Papotages. Quelques questions sur le lieu où nous devons nous rendre. Je sais rester évasif. Aucune réponse destructive de surprise. Nous partons. L’ascenseur est petit, je descends quatre à quatre par l’escalier. Le chemin, même à pied, n’est pas très long. Nous arrivons devant le restaurant. Le rideau de fer est toujours baissé, la porte et les fenêtres toujours occultées. Ma famille s’inquiète. Je prends la tête du groupe, nous longeons la façade, nous tournons au coin. Dans l’ombre, un FFI nous attend, mitraillette en bandoulière. Il nous appelle à voix basse.
— Vous venez pour...
— Oui.
— Vite, suivez-moi, faut pas se faire arrêter par une patrouille... On va passer par derrière, c'est plus discret...

Il nous guide. Il ouvre une porte qui donne sur une petite cour intérieure remplie de poubelles et nous fais signe d’entrer. Il referme soigneusement la porte derrière nous. De l’autre côté de la courette, une seconde porte. Il l’ouvre et nous fait signe d'entrer. Il reste à l’extérieur et referme la porte sur nous. Son travail est terminé. Nous sommes arrivés.

Le restaurant, meublé et décoré années 1940 n’a que quelques tables. Le long d’un mur, posée sur un meuble, une grande radio à tubes, habillée de bois ajouré, diffuse Radio Londres en sourdine. Quelques tables sont déjà occupées. Une serveuse nous place.
— On n'a pas grand chose aujourd’hui, avec toutes ces restrictions. Enfin, on a fait ce qu’on a pu.

Le repas ne manque de rien. Sans être pantagruélique, il est assez copieux. Pour les légumes, nous avons droit aux sempiternels topinambours et rutabagas. Pendant son déroulement, nous assistons, entre serveurs et serveuses, à de très réalistes scènes de vie sous l’occupation. Si mes souvenirs sont bons, nous avons même droit à une coupure d'électricité en plein milieu du service. Bougies et lampes à pétrole.

Quand les desserts sont consommés à toutes les tables, nous revenons à la fin du 20e siècle. Le FFI, les serveuses et les serveurs sont tous des comédiens qui ont eu l’idée de créer ce restaurant-spectacle plaçant les clients-spectateurs dans une sorte de réalité parallèle et décalée dans le temps. Une très belle idée, un peu curieuse, mais belle.

Je ne sais pas vraiment si mes quatre invités ont apprécié autant que moi cette plongée dans un temps que je n’ai pas connu et pendant lequel leur vie n’a pas été trop heureuse, mais ils m’ont remercié sincèrement pour la soirée.

Le Couvre-Feu n’a vécu qu'une année ou deux, le soir, et seulement quelques jours par semaine. Les autres jours, il restait fermé, et on ne pouvait même pas passer par derrière pour y entrer. Ses habitants voguaient ailleurs, dans d’autres temps.

CouvreFeu.jpg

De retour dans mon ancien quartier, en 2005, « Passant par là, quelque vingt ans plus tard » comme dit Brassens, je veux voir si la devanture du restaurant existe toujours. La rue Philippe-de-Girard est en travaux. Il y a toujours des travaux dans les rues de Paris. La devanture est encore là, malgré les années de fermeture réelle. J’ai un appareil photo sur moi (2005 est l’année où je fais des photos tous les jours, voir Couples singuliers). Je prends un cliché. Un seul. Le seul document en ma possession pour me souvenir de cette soirée mémorable avec toute ma famille. Un document, hélas, obtenu a posteriori. Je ne sais s’il existe d’autres traces du lieu et du spectacle, du moins, je n’en ai trouvé aucune.

Encore un peu de typo et d’histoire, pour finir. L’exécution de lettres pour l’enseigne est de qualité, la typo, très années 1930 colle très bien avec ce qu’on avait voulu faire dans ce lieu... et les petites mentions Téléphone (pas si courant d’en avoir un dans les années 1940) et Buffet froid sont de jolis clins d’œil. Le RESTAURANT en capitales de fantaisie est un peu plus contestable en raison de sa médiocre lisibilité.

Publié le 16/05/2025 @ 09:30   Tous les billets   Prévisualiser...   Imprimer...   Haut


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