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Thomas Braun
des fromages
8 pages,
format 11,2 x 9 cm.
tirage à 131 exemplaires en typographie.
CLS
Un volumen,
79 cm de long, 17,5 cm de haut.
tirage à 10 exemplaires en linogravure.
Marie-Rose de France
26 petits textes en proses poétique. Vignettes de CLS.
tirage à 120 exemplaires en typographie au plomb.
Pierre Pinelli
24 pages,
format 15 x 20 cm.
tirage à 100 exemplaires en typographie au plomb.
Auteurs
Chronologique
Des barbares...
Casses
Divertissements
Fin-de-Siècle
Fourneau et Fornax
Impressions
Musées
Typographie
... pour ceux qui auraient la flemme de chercher.
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L’humain est grégaire. L’humain, vous savez, c’est le bipède dont je parle de temps en temps. Il est grégaire. Comme les moutons mais eux, ils sont quadrupèdes. Comme les étourneaux, mais eux, ils sont bipattes à ailes. Enfin, ils sont tous grégaires. Et il y en a d’autres, des grégaires, mais on ne va pas tous les énumérer, ce serait long et inutile.
Disons que le bipède moyen, normal, ordinaire, en général — il y a toujours des exceptions, c’est comme dans la grammaire, sinon ça serait pas drôle — aime bien se retrouver avec d’autres bipèdes, pas trop loin des autres. Chez les moutons, ça s’appelle un troupeau mais chez les bipèdes qui ne veulent pas qu’on les confonde avec les moutons, ça s’appelle une foule ou, quand les bipèdes sont à l’abri dans une structure qui les protège des intempéries, ça s’appelle un village ou une ville, ou une mégapole quand il y a des mégabipèdes assemblés, accumulés, agglutinés. Les structures qui abritent, on appelle ça des maisons, ou des appartements. Dans les maisons ou dans les appartements, on peut trouver des bipèdes isolés, mais pas loin quand même des autres bipèdes, ou alors on peut en trouver plusieurs qui ont choisi de s’assembler, pour fabriquer d’autres bipèdes, ou pas. On appelle ça, généralement, une famille.
Les bipèdes aiment bien les villes parce qu’ils voient et côtoient plein d’autres bipèdes avec qui ils ne conversent pas parce qu’ils ne se connaissent pas. Mais ils aiment ça, les bipèdes. Ils aiment être dans les villes pour côtoyer d’autres bipèdes sans leur parler. C’est à cause de leur instinct grégaire. C’est comme ça. L’ennui, dans les villes, c’est qu’il y a parfois, même souvent, plus de bipèdes qui y sont que d’abris possibles (maisons, appartements). Ceux qui n’ont pas d’abri, parce qu’ils n’en ont pas trouvé, on les appelle des sans abri. On n’est pas allé chercher bien loin pour leur trouver un nom. Des bipèdes qui se la pètent et qui aiment bien inventer des noms compliqués parce que ça fait bien, ça fait instructionné, les appellent aussi des sans domicile fixe. Domicile fixe, c’est pareil que maison ou appartement, mais c’est plus chic à dire.
Dans le temps, autrefois ou jadis, mais pas naguère, les bipèdes étaient grégaires, mais moins. Ils acceptaient de vivre dans des villages. Les villages, c’est comme les villes, mais en plus petit. Les bipèdes choisissaient un endroit, et ils construisaient leurs abris les uns à côté des autres, mais pas beaucoup. C’est ça un village : des abris, mais pas beaucoup. Et les bipèdes qui étaient un peu moins grégaires que les autres construisaient leur abri sur les bords du village. Comme ça, ils pouvaient voir le villages et les autres bipèdes quand ils en avaient envie, et quand ils n’en avaient pas envie, ils regardaient ailleurs. Là où il n’y avait pas des bipèdes.
Mais au fil du temps, les bipèdes des villages ont préféré aller dans les villes, là où on trouve plus de bipèdes pour grégariser, quitte à ne pas trouver d’abri. Et ils abandonnaient leur abri du village qui n’abritait plus personne. Et les pauvres abris qui n’abritaient plus personne et qui n’étaient plus entretenus par personne, commençaient à s’abîmer, à se fendiller, à se lézarder, à tomber petit à petit en morceaux jusqu’à disparaître petits bouts par petits bouts.
Et les bipèdes qui vivaient encore à côté dans leurs propres abris les regardaient se dégrader sans pouvoir rien faire. Et on finissait par oublier que des bipèdes avaient vécu là, et qu’ils avaient été heureux de vivre là. Souvent, c’était les enfants des bipèdes qui partaient pour devenir sans abri dans les villes et qui laissaient leurs parents continuer à vivre dans l’abri du village. Et quand les parents disparaissaient pour aller vivre sous la terre, l’abri restait seul et vide, sans personne pour vivre dedans. Avec la tristesse de se dire que bientôt plus personne des bipèdes qui restaient ne se souviendraient de lui ni des bipèdes qui vivaient dans lui.
Bien sûr, bien sûr, les photos sont un peu pourraves. Normal. Une photo ne peut être que pourrave quand on espère qu’elle soit un reflet exact de la réalité. Ouais... mais faudrait d’abord savoir ce qu’est la réalité. Refrain connu. Ce qu’on perçoit et qu’on nomme réalité, nous les bipèdes qu’on dit de nous-mêmes qu’on est doté de raison (faudrait aussi savoir ce qu’est la raison), avec nos cinq minables petits sens qu’on ne sait même pas dans quel sens ils fonctionnent, qui captent ce qu’ils peuvent, et qu’on comprend ce qu’ils ont capté avec l’attention qu’on peut, est-ce que c’est ça la réalité ? Et est-ce que la réalité bipédique est la même que la réalité de la mouche (ou de l’abeille, c’est plus noble comme bestiole), ou la réalité du crocodile, ou la réalité du bousier coprophage, ou (pour faire plaisir aux petlovers) la réalité des chiens, des chats ou des cochons d’Inde ? Ou la réalité du nénuphar aquatique, ou celle du pavot somnifère, ou celle de la feuille de coca du Pérou, parce qu’elles doivent bien avoir une réalité, les plantes, elles aussi ?
Les plantes, on y vient. Les photos qui sont ou qui ne sont pas un reflet (dans quel miroir ?) de la réalité, qu’on voit, là, dans ce billet, sont, l’un dans l’autre, des photos d’un champ de lin. Bien, on avance. D’un champ de lin en fleur. Et c’est là où ça débloque par rapport à ce qu’on perçoit avec nos yeux de bipèdes censés être évolués et qu’on nomme réalité, alors qu’on ne sait même pas ce que veut dire ce mot de réalité, la couleur des fleurs de lin des photos n’est pas la même que la couleur qu’on voit avec nos yeux de bipède. Est-ce grave ? Non. Demandez à n’importe quelle abeille qui passe ce qu’elle en pense, elle vous dira qu’elle s’en fout comme de son premier voyage pollinisateur. Le bleu de la fleur de lin, pour nous, est d’un bleu pâle, qu’on peut trouver assez chouette, et qui n’a strictement rien à voir avec le bleu du myosotis, ou le bleu du ciel, ou le bleu du lapis-lazuli (c’est beau, ce mot lapis-lazuli, on dirait une petite fille qui danse en robe pastel avec une couronne tressée de myosotis et de bleuets au front), ou le bleu délavé et scandinave des yeux de la petite amie du cousin de ton voisin de palier. Il a pas de palier, ton voisin, pas grave, on supprime le palier, et on garde le voisin. Et si t’as pas de voisin, va voir à Oulan-Bator ou à Tombouctou si j’y suis.
Le lin, ça c’est une chouette plante ! Avec sa graine, on fait de l’huile, et avec sa tige, on fait du fil. Vachement utile, le lin. Surtout pour les vieillards pas encore trop séniles comme moi qui continuent, contre vents et marées (heu... du vent, y’en a dans la Champagne où j’écris ce billet informe, mais des marées... y’en a plus depuis le Crétacé ; les dinosaures ont connu, pas moi, j’suis pas assez vieux), qui, comme moi, contre vent d’Est ou vent d’Ouest, continuent à faire des livres avec des petits bouts de plomb, de l’encre, du papier et du fil de couture.
Avec l’huile de lin qu’on fait bouillir, on obtient du vernis, qu’on mélange avec du noir de fumée, et on obtient de l’encre pour mettre sur les petits bouts de plomb afin de salir le papier. Avec le fil de lin et une aiguille, on coud les petits livres fabriqués pour que les feuilles, ou les cahiers, se barrent pas dans tous les sens. Et le fil de lin, c’est le plus solide de tous les fils végétaux de le Monde entier ! Voilà pourquoi, j’suis ému quand je passe à côté d’un champ de lin en fleur.
... Et en plus, avec le lin, on fait des draps si farabuleux qu’un éditeur-typographe au plomb, allongé entre eux fait des rêves d’Alde Manuce, de Christophe Plantin, de Fournier le jeune, d’Ambroise Didot, de Guy Lévis Mano... et de Gutenberg, bien sûr ! Euh, on m’a dit qu’aujourd’hui, c’était la fête des paires. Donc, la fête des paires de draps de lit en lin. Youpi !
P.-S. (10 minutes plus tard) : Et avec les draps de lin qu’on a bien rêvé dedans pendant des années et des années, qu’ils sont devenus tout usés, plus fatigués que l’éditeur-typographe qui dort dedans, que les pauvres ne sont plus utilisables sur un lit parce qu’ils sont déchirés, troués, enloqués d’un peu partout, on les refile à un papetier à l’ancienne qui va en faire de la pâte à papier, puis du papier à partir de la pâte. Du papier si tant beau, si tant agréable au toucher, si tant sensuel qu’on ne peut pas faire autrement que de fabriquer des chouettes livres avec, imprimés avec de l’encre de vernis d’huile de lin et cousus avec du fil de lin. Et toc !
Elle était là, souriante, aguicheuse, provocante même, et en petite tenue... Alors lui, plus tout jeune mais encore vert, n’a pas pu résister. C’est la loi de l’attraction universelle, et ce qui est valable pour les planètes, les corps célestes, l’est aussi pour les corps humains. L’ennui, dans cette histoire banale, si banale qu’elle tient à l’universel, c’est qu’elle était à Lyon et qu’il était à Paris. Ils n’ont jamais pu se rencontrer. Malgré leur désir, les forces d’attraction étaient trop faibles. Vacherie de physique ! Ah la la ! les grandes histoires d’amour sont toujours désespérées.
Cette photo a été prise par une belle journée ensoleillée, rue des Boulets, à Paris, dans le 11e arrondissement. Non ! Mesdames les parisiennes, non ! Messieurs les parisiens, ne vous précipitez pas rue des Boulets pour contempler l’œuvre d’art photographiée, elle n’existe plus. La photo a été prise car nous craignions, justement, qu’elle ne disparaisse, et nous voulions en garder la trace. Pourquoi ? Parce que nous la trouvions intéressante, bien construite, à partir d’un matériau modeste — de simples cannettes en aluminium détournées de la poubelle — parce qu’elle était positive, parce qu’elle ne se faisait aucune illusion au sujet de sa durée de vie, parce qu’elle apportait un joli message, parce qu’elle provoquait la réflexion sur l’art, parce que son message était calligraphié dans une linéale allongée simple et efficace, parce qu’il est bien (merci, l’artiste anonyme !) de vouloir agréablement décorer les murs des villes plutôt que de les ruiner avec d’infâmes signatures.
Ça vous suffit, comme raisons ? Oui ? Dans ce cas-là, circulez, y’a plus rien à voir...
On connaît la situation catastrophique des finances françaises. On nous en rebat les oreilles dans tous les medias d’information. Et on connaît les deux points noirs qui grèvent le budget : l’hôpital et l’éducation.
On atermoie, on atermoie, pourtant la résolution de ce problème est simple. En ce qui concerne l’hôpital : laisser mourir tous les malades, ce qui relancera l’économie funéraire (se pose toutefois la difficulté des crémations qui nuisent à la couche d’ozone avec les fumées) ; de plus cela allégera le budget de la sécurité sociale. Ne soigner que les gens bien portant qui pourront ainsi, par leur vitalité et leur travail acharné, servir positivement l’économie nationale.
Pour ce qui est de l’école, la situation à régler n’est pas beaucoup plus compliquée. La vocation professorale est en très nette baisse, certes, cela s’explique par le manque d’attractivité financière du métier et surtout par le risque omniprésent de se faire assassiner par un élève. Que les professeurs se convertissent tous en agents des pompes funèbres, un secteur en plein essor économique (voir plus haut) et laissons écoles, collèges, lycées, voire universités entre les mains des seuls élèves ou étudiants afin qu’ils puissent s’entretuer entre eux. Par cette pratique ils vont acquérir une rapide expérience dans le métier d’assassin qui ne nécessite pas beaucoup de compétences, avouons-le, et qui peut surtout se passer de professeurs et de théories. Nantis de ce savoir pratique, ils pourront, après leurs années d’apprentissage, entrer au service de l’état, comme militaires ou comme agents du service de renseignement extérieur, par exemple, ou bien ils iront verser dans le privé, cooptés par telle ou telle bande mafieuse qui se félicitera de les avoir embauchés. Ainsi règle-t-on la crise des débouchés pour les jeunes.
La situation de l’école, une impasse ? Qui pourra bientôt prétendre cela sans rougir de honte !
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Fornax éditeur 18, route de Coizard, 51230 Bannes – France