Page en cours de chargement
Thomas Braun
des fromages
8 pages,
format 11,2 x 9 cm.
tirage à 131 exemplaires en typographie.
CLS
Un volumen,
79 cm de long, 17,5 cm de haut.
tirage à 10 exemplaires en linogravure.
Marie-Rose de France
26 petits textes en proses poétique. Vignettes de CLS.
tirage à 120 exemplaires en typographie au plomb.
Pierre Pinelli
24 pages,
format 15 x 20 cm.
tirage à 100 exemplaires en typographie au plomb.
(vidéos)

Auteurs

Chronologique

Des barbares...
... pour ceux qui auraient la flemme de chercher.

Bibliotératologie

Casses

Divertissements

Fin-de-Siècle

Fourneau et Fornax

Impressions

Typographie
11790264 visiteurs
7 visiteurs en ligne
Le Passe-muraille, dont les exploits nous ont été contés par l’historien Marcel Aymé, avait décidé, pour gagner du temps, de se munir d’une bicyclette pour passer tous les obstacles qu’il avait l’habitude auparavant de franchir à pied. Tout alla pour le mieux jusqu’à ce qu’un mauvais plaisant ou un marlou de la pire espèce lui subtilise le véloce instrument. Dépité, mi-sorti d’un mur, il harangua la foule des passants qui passent pour se plaindre et conter son malheur.

Jusqu’à ce qu’un bon Samaritain, un homme de bien, un juste, un méritant désintéressé retrouve l’objet dont la perte faisait son désespoir.

Depuis, il cambriole à nouveau de gauche, de droite, partout et à tire-larigot en caracolant guilleret sur son bicycle retrouvé. Et lorsqu’il en descend pour accomplir ses larcins, il prend bien garde de mettre son anti-vol et de le verrouiller à double tour. Les chapardeurs sont si prompts au chapardage...
autour des caractères
Voilà, voilà, on y vient. Je vais enfin tenir ma promesse... « une fois n’est pas coutume » comme la sagesse des nations nous l’apprend dès la petite école.
Donc, voici quelques jours, j’ai reçu une visite. Un jeune collègue qui, courtois et poli, avait annoncé sa venue et qui, à peine arrivé dans l’atelier, m’a fait un cadeau avec, en guise de papier fantaisie pour l’emballer, un défet de l’une de ses dernières impressions, ce qui m’a beaucoup touché.
Le cadeau ? Un livre ! Un livre cartonné traitant d’un sujet qui nous touchait tous les deux de près : les caractères typographiques. L’auteur ? David Rault. Le titre ? Caractères. Avec comme sous-titre : la formidable histoire des caractères typographiques & de leurs auteurs en bandes dessinées. En bandes dessinées... on y reviendra.

Pour l’anecdote (on a le droit de sauter ce paragraphe si l’on est pressé), j’ai un peu croisé l’auteur, essentiellement par courriel, lors de la mise au point de la maquette du volume Histoire de l’écriture typographique, le XIXe siècle français chez Perrousseau dont j’étais le co-auteur, sollicité par Jacques André. Et je l’ai revu IRL lors de la présentation de la collection complète de cette série sur la lettre quelques mois plus tard, à l’école des Chartes. Fin de l’anecdote.
En bandes dessinées… De nos jours, si l’on veut qu’un sujet — quel qu’il soit — puisse être abordé par un nombre suffisant de lecteurs, il faut lui coller des images. Plein d’images. Nous sommes depuis quelques décennies déjà entré dans la civilisation des images. Images qui bougent. Images fixes photographiées. Images fixes dessinées. Images regroupées en bandes et sarabandes, les bandes dessinées. Pourquoi pas ? Mais cette manie relativement nouvelle de tout illustrer semble cacher un fait qui s’avère de plus en plus au fil du temps : la difficulté d’appréhender un sujet rien qu’avec des mots. Comme si se développait une peur des mots. Comme si les mots étaient devenus trop abstraits pour expliquer un sujet, un concept, une idée. Des mots, oui, d’accord, mais point trop n’en faut, faut remplacer l’essentiel par des images, c’est plus facile à lire même si on les lit de travers. On a du visuel, qu’importe la compréhension fine.
Bien sûr la chose n’est pas neuve. Dès le Moyen Age, alors que l’essentiel de la population ne savait pas lire, on a imaginé la Bible des pauvres, la vie de Jésus, les Évangiles en dessins, en bandes dessinées, les premières créées bien avant Rodolphe Töpffer et son Monsieur Vieux Bois, avant Christophe et sa Famille Fenouillard, avant Louis Forton et ses Pieds Nickelés. Mais l’essentiel de la population ne savait pas lire, c’était logique. De nos jours, l’essentiel de la population sait lire, c’est moins logique. À moins que... à moins que... on le constate, la population commence à dé-lire, à dé-écrire, à ne plus pratiquer correctement ni facilement les mots et les phrases qu’ils forment pour créer un sens. Le paradoxe, ici, c’est que le sujet, c’est la création des lettres qui servent à former des mots qui servent à former des phrases qui servent à transmettre un sens. La lettre est l’élément fondamental et premier du mot, l’alphabet est le tableau de Mendeleïev de l’écriture, voire du sens. Certes il est vrai qu’à tout prendre, une lettre n’est qu’un dessin particulier établi à partir d’un squelette hérité de longue date. Toutefois, faire ainsi une bande dessinée pour parler de la forme de la lettre c’est, ce me semble, aller dans le sens de la dé-lecture et de la dé-écriture, de l’appauvrissement, de la facilité. On me rétorquera qu’ici on ne s’occupe pas de la lettre et du sens qu’elle porte en elle quand elle s’assemble à d’autres mais à sa forme, à son aspect physique, et aux créateurs qui ont imaginé ces infimes variations de forme. Soit. Toutes proportions gardées, ça me fait penser à ces vieux (ou jeunes) machos qui ne jaugent que l’esthétique des femmes sans se préoccuper de l’esprit qu’elles ont. Ce n’est pas un mal, en revanche, de parler des créateurs de formes de caractères et de les mettre en avant. Ils sont méconnus comme la plupart des créateurs des choses de notre quotidien. Qui connaît le nom de l’inventeur du tire-bouchon ? De l’abat-jour ou des bésicles ? La plupart d’entre-nous s’en moque et ne sait pas. Tout ce qui compte, c’est que leur création soit agréable à utiliser.
Anecdote bis. Il m’est arrivé de fréquenter un certain représentant de papier à imprimer. Lors de l’un de ses passages, on discute lettres d’imprimerie, je lui montre un A de caractère bâton et un A de caractère à empattements. Je lui demande s’il voit une différence entre les deux. Sa réponse : « Ben non, ce sont deux A ! ».
Les subtilités qui réjouissent les professionnels aguerris passent très largement au dessus de la tête de la plupart des bipèdes non professionnels (et même de quelques professionnels). Dès lors pourquoi vouloir faire un ouvrage à la vocation « grand public » alors qu’on peut subodorer que le grand public ne pourra pas capter l’infime différence de telle ou telle variation de caractères par rapport à une version antérieure. Surtout dans un ouvrage volontairement simplificateur pour être à la portée du plus grand nombre. Pour que le grand public puisse discerner la subtilité de ces variations, il faut entrer plus finement dans le sujet, montrer les détails, comparer de manière précise les variations, et les expliquer. On n’a plus alors affaire à un ouvrage pour grand public mais à un « manuel technique », à un ouvrage pour les spécialistes, pour les professionnels, qui n’intéressera pas — le plus souvent — le grand public.
Un ouvrage comme Caractères, acheté par un non spécialiste ne sera probablement pas intimement compris par le lecteur, même s’il est de bonne composition car il nécessite des bases que ce lecteur lambda n’a pas. Il découvre. Il peut toutefois susciter de l’intérêt chez un lecteur curieux qui voudra peut-être approfondir le sujet dans un ouvrage plus pointu. Acheté par un professionnel, il sera vu comme une curiosité amusante et rangé comme tel dans sa bibliothèque.

Une page de l’ouvrage. Les fonds colorés des images aux couleurs tranchées, disposées en damier nous éloignent de l’idée de base que l’on se fait d’une bande dessinée, mais pourquoi pas, à cette réserve près que certains des textes en blanc sur ces fonds sont totalement illisibles, ce qui peut paraître gênant si l’on a envie de les lire.
On notera, sur la page montrée, une imprécision qui — sans être catastrophique — est un peu regrettable. Le génial artiste tous azimuts qu’était William Morris, instigateur du mouvement Arts and Crafts, n’a pas gravé le caractère Golden Type, il n’a fait que le dessiner. Voir plus bas à ce sujet.
Plus embêtante, page 39, l’affirmation de l’origine allemande de la machine de composition chaude en ligne-bloc Linotype alors qu’elle est américaine. Certes, le nom de son inventeur possède des consonances allemandes, Ottmar Mergenthaler, mais il était horloger et américain pur jus. De quoi nous fâcher avec l’actuel président des États-Unis qui, s’il apprenait la bévue, pourrait nous punir d’une augmentation des droits de douane. L’erreur aurait pu être évitée car le bon renseignement était donné dans l’ouvrage cité tout en haut de ce billet dont notre auteur de bandes dessinées avait assuré la mise en page.
Et puisqu’on parle de mise en page, on pourrait trouver curieuses les deux pages de droite vierges (47 & 81) tant on est habitué à la virginité des pages de gauche mais pas à celle des pages de droite. Sans doute un hommage caché et délicat au Tristram Shandy de Sterne, premier ouvrage à révolutionner le roman et la mise en page.
Cela étant dit et nonobstant ces quelques imperfection, les lecteurs qui voudraient avoir quelques lumières sur les créateurs de caractères, surtout les créateurs contemporains ou néo-contemporains, trouveront leur pitance informative dans l’ouvrage. Je regrette toutefois, à titre personnel, l’absence de George Auriol, d’Eugène Grasset, et surtout de Fournier le jeune dans l’aréopage concocté par David Rault. Mais on ne pouvait pas inclure tout le monde, j’en ai bien conscience.
*
* *
William Morris crée une imprimerie et maison d’édition la Kelmscott Press, en 1891. Il donne ainsi l’essor à un mouvement, celui des petites presses privées anglaises de la fin du XIXe siècle et du début du XXe. Il est graveur mais pas graveur de poinçons, un métier bien à part. Quand il imagine et dessine ses trois caractères exclusifs le Troy, le Chaucer et le Golden, il en confie la réalisation des poinçons à Edward Philip Prince. C’est à ce même Edward Philip Prince que toutes les autres presses privées anglaises confient à sa suite la réalisation de la gravure de leurs caractères.
Un ouvrage anglais publié en 1967 retrace sa vie et son œuvre.


Quelques caractères gravés par Prince.

Lorsqu’on regarde comme ça, en passant qui passe, l’âme vagabonde et l’œil dans le vague, on se dit : « Tiens, une inscription dans une écriture que je ne connais pas... » et on passe à autre chose. Il nous reste tellement d’autres choses à voir, à admirer et à découvrir — quel que soit notre âge —qu’on ne s’arrête pas sur tout ce qui nous passe devant les yeux pour scruter, examiner, détailler et enfin intégrer et comprendre. Ça donnerait beaucoup trop de boulot. On passe donc à autre chose et on continue son petit bonhomme de chemin cahin-caha sans s’encombrer la comprenure.
Pourtant, parfois, ça vaut le coup de se l’encombrer la comprenure. Et de s’arrêter. Et de scruter. Là, en l’occurrence, c’est d’un truc un peu rigolo qu’elle va s’encombrer. Parce que, si on fait bien attention de façon attentive (seulement un peu), on s’aperçoit vite qu’on n’a pas affaire ici à une écriture ni à une langue qu’on ne connait pas.
C’est de l’écriture un peu cursive, en français, mais à l’envers. Alors de quoi il s’agit ? « Encore un machin-truc de typo ! » vont ratiociner les blasés, précieux et dégoûtés, amateurs de critiques perfides et acerbes. Que nenni mes bons ! Not at all ! Gourance, gourure et gourition !
La chose sur laquelle est inscrite cette phrase est une terre cuite émaillée. Elle est signée de Gabriel Sébastien Simonet, dit Sébastien. Elle date de 1950 et elle se trouve au musée de la céramique, à Sèvres. Si on a la flemme de comprendir ce que ça dit en remontant à rebrousse-poil, on peut user d’un miroir. Cet objet magique a la propriété farabuleuse d’inverser automatiquement le sens de la lecturition. Quant à savoir pourquoi l’inscription est à l’envers, faut demander au céramiste Sébastien parce que moi, pas savoir.
Oui. Je sais. J’avais encore dit hier que je parlerais de visite et de cadeau. Je devais le faire aujourd’hui. Mais j’avais pas trop envie. Ça arrive, non ?
Oui, je sais, j'avais dit hier que je parlerais ici de visite et de cadeau.

Mais je me sens un peu fatigué et je n’ai pas le courage aujourd’hui. Je vais procrastiner jusqu’à demain, ça ne peut pas me faire de mal. Ni à vous non plus. Enfin, je crois...
ici ou là

Parfois on se visite entre bipèdes qui se disent civilisés, on se visite et il arrive que le visiteur offre un quelque chose au visité parce qu’il pense que ça peut faire plaisir au visité, ou que ça peut l’intéresser, ou pour se faire pardonner la visite qui bouffe du temps au visité, un temps qu’il aurait pu utiliser à autre chose comme, par exemple, travailler, ou cultiver son jardin s’il en a un, ou dormir, ou ne rien faire du tout ce qui est le summum esthétique, pratique et délectable de l’occupation du temps.
Ne rien faire du tout est une expression mentisseuse, relevons le, parce que ce n’est jamais vrai qu’on ne fait rien du tout tant qu’on n’est pas mort. Quand on est mort, là c’est vrai, on ne fait plus rien du tout mais on n’en a plus trop conscience de cette plénitude du rien du tout. Tant qu’on est vivant, notre rien du tout personnel est perturbé par notre corps qui nous oblige à faire tout un tas de choses qu’on n’est plus obligé de faire quand on est mort : respirer, pisser et caguer, roter, prouter, avoir faim si on n’a pas mangé, digérer si on a mangé, suer si on a chaud, grelotter si on a froid, rêver si on dort, et tout un tas d’autres choses auxquelles je ne pense pas, ou plus... Ah ! si, quand même, j’allais l’oublier alors que je viens de le dire : penser. Même quand on ne fait rien, on pense. On ne peut pas s’en empêcher, on pense. Ce qu’on pense peut être important ou ridiculement pas important, futile, idiot, basique, inintéressant, inopiné, incongru, absurde mais on le pense. Il n’y a que les très grands sages qui, après des années et des années d’efforts acharnés, arrivent à ne plus penser du tout, à faire comme s’ils étaient morts. À quoi ça sert ? Peut-être à se passer des autres, à s’isoler, à se passer de tout, y compris de son corps qui pense. Tout ça pour emmerder Descartes.
Quand on ne pense plus à rien du tout, on peut s’imaginer... — merde, si on s’imagine, c’est qu’on pense, reprenons... — on n’est plus censé exister, ce qui est assez confortable, car dans ce cas, on n’a plus de besoins, ni de désirs, ni de félicités, ni d’emmerdements. Ou alors, ou alors on n’est qu’une image mentale dans la tête d’un autre qui pense. Mais on n’en a pas conscience parce qu’on ne pense pas. Ce qui est assez confortable, quand on y pense (Ah, crotte, zut, flûte !). Bon. On peut donc conclure de tout ce fatras que les très grands sages qui arrivent à ne plus penser du tout n’existent pas même quand ils existent parce qu’ils ont réussi à rassembler un certain nombres d’atomes qui les fait ressembler à de l’existant matériel. Mais ce n’est qu’une illusion. Les très grands sages ne sont que des illusions. Du moins ceux qui arrivent à ne plus penser. Passons.
Moi, quand je me pince, ça me fait « Aïe ! » dans la bouche, et je pense : « Quel crétin je fais ! », donc je ne suis pas un très grand sage. Ce qui me rassure un peu, même si je peux encore croire (pas beaucoup) que je ne suis qu’une image mentale dans la tête d’un autre qui pense. Toutefois, quand je pense que je pense, parfois ça me donne des aigreurs d’estomac. Et comme l’aigreur est humaine puisqu’elle est rattachée au corps — et précisément à l’estomac — je pense que je suis humain, ou bipède qui pense, mais je n’en suis pas sûr à cent pour cent. Je me donne une marge d’erreur. Une marge d’erreur, c’est tout ce que j’ai puisque je me la suis donnée et que je la garde à proximité. Ce n’est pas beaucoup mais c’est toujours ça de pris.
Maintenant une autre question se pose. Est-ce que le fait d’avoir une marge fait de nous un existant en marge ? Avoir une marge ne veut pas nécessairement dire que l’on évolue dedans (si jamais on évolue). On peut être à côté de la marge. Ce qui pourrait tenter de prouver que j’existe un peu puisque je ne pense pas (!) qu’une marge puisse exister seule sans existant (bipède ou non) pour la créer. Enfin, je crois. Mais je n’en suis pas sûr. Mais peut-être aussi que le seul fait de croire que je crois est une forme de pensée, donc d’existence. En fin de compte. Peut-être… Mais je n’en suis toujours pas sûr.
...
Heu, au départ, je voulais vous parler d’une visite et d’un cadeau. Je pense qu’on verra ça demain, d’accord ?...
Tératologie livresque
Typo rurale
Typo des rues
Typo des bois
Proverbes
Pratique éditoriale
Pratique typographique
Post-concours
Nouvelles internes
Nouvelles externes
Mes maîtres
Livre
Lieux de convivialité
La photo du jour...
Impressions
Impression
Fourneau-Fornax
Contes et nouvelles
Concours
Bibliophilie
Art
Amis
Alphabet
Fornax éditeur 18, route de Coizard, 51230 Bannes – France